Jul,objet rappant bien identifié

Après dix ans de carrière, le plus Marseillais des rappeurs Français, est devenu l’un des boss de la planète rap tricolore. Un ovni au flow inclassable et à la productivité sans limite, qui fascine autant qu’il divise et qui n’a de cesse de faire parler de lui dans les médias. Le comble pour cet alien plutôt timide, très rare dans la presse et qui semble bien plus intéressé par la scène que par le succès. Autodidacte, autoproduit et autotune, pour mieux comprendre ce gadjo à l’accent chantant : petit tour d’horizon de la planète Jul.

Jul aka Julien Mari, né le 14 janvier 1990, quartier Saint-Jean-du-Désert , dans le Ve arrondissement de Marseille. Un quartier tranquille de la cité phocéenne, ni trop riche, ni trop pauvre, pas vraiment excentré mais pas central non plus. Ado, Julien fait de sa chambre son véritable vaisseau rap, et compose ses premiers morceaux dès l’âge de 13 ans, sous le blaze de Juliano 135. A l’époque, déjà, Jul raconte son quotidien avec beaucoup de simplicité, de sincérité même, sans chercher à faire le caïd qu’il n’est pas. Il rappe ses potes, son quartier et les contrôles de police.

Des textes authentiques

Très vite, le minot se professionnalise et signe avec le label Liga One Industry en 2008. Après plusieurs singles, il connaît le premier gros succès d’une interminable série, avec l’album Dans ma paranoïa, en 2014. Un an plus tard, il reçoit son premier disque de platine, et sa première leçon sur le métier : dans le business, mieux vaut faire cavalier seul. En effet, après une collaboration amère et une polémique virulente, Jul quitte son label et décide de s’autoproduire. Dès 2015, il le sait, autour de lui il ne veut que les vrais, sa famille et ses amis les plus proches seront, à présent, ses seuls collaborateurs.

La suite est vertigineuse tant le jeune rappeur est une comète. Jul c’est 21 albums studio – dont le dernier est sorti ce 24 janvier dernier pour ses dix ans de carrière – 8 albums gratuits, une mixtape, deux albums collaboratifs, sans compter les rééditions. Au total l’artiste a sorti plus d’une trentaine d’albums, dont 39 disques d’or, 52 disques de platine et 22 disques de diamants. Mis bout à bout, ce ne sont pas moins de 7 millions d’exemplaires vendus et le milliard de stream dépassés l’été dernier sur spotify.

Marseille, sa terre

Au-delà de la musique, Jul a aussi fait exploser la fame autour de Marseille, sa terre de cœur. Fier de sa ville, de son quartier et de ses origines populaires, Jul est devenu un symbole pour les marseillais. Le gars du coin qui s’est hissé en haut des charts à la seule force de son travail et de son talent. Son accent du sud, sa ville, son équipe de foot, Jul les porte hauts et forts dans ses sons comme dans ses clips. Après IAM, Soprano ou Alonzo, Julien Mari du quartier « Saint-Jean-la-Puenta» est lui aussi devenu un ambassadeur du rap phocéen.

Mais qu’est-ce que sa musique a de si spéciale ? Sur la question du son, Jul fait couler beaucoup d’encre. Imposteur dopé au vocodeur pour les puristes ou véritable génie pour les autres, Jul divise. Après de nombreuses écoutes, on pense avoir un début de réponse : Jul est populaire. Par populaire on entend qu’il touche un public large parce que les origines de ses sons, les influences de sa musique sont diverses et très éclectiques. Dans la lignée des plus grands rappeurs marseillais, Jul propose pourtant une musique bien à lui, piochant autant dans la variété française que dans la funk et ne rougissant pas d’y ajouter du reggaeton. Ce «un peu de tout», le rappeur l’enrobe d’un vocodeur qu’il maitrise et qu’il pose sur des mélodies répétitives et entêtantes. Quoi qu’en disent les rageux, nous ça nous semble être la meilleure recette pour faire un tube. Si l’on ajoute à cela une belle pincée de marketing et énormément de travail en ce qu’il le concerne, on obtient cet objet – finalement bien identifié – qui n’a pas fini d’éblouir la planète rap.

Camille Poher.