Leo SVR, contre vents et marées

Le Flow : Peet, jazzy belge

Début avril, le natif de Saint-Vincent-de-Reins s’est entretenu avec Le Flow lors de son passage en terres helvétiques dans le cadre du Sunchaser Tour à La Gravière. L’occasion pour l’artiste de 25 ans de s’épancher sur son identité artistique, l’élaboration de son dernier projet en date ou encore son concert préféré (S/O les Xtrm Boyz). Portrait.

« Représenter là d’où je viens ça fait partie de mon identité. Des SVR il y’en a partout en France, on est plein ». À l’écoute de ses divers projets, le constat est le suivant ; Leo SVR est empreint d’une sincère authenticité, fait suffisamment rare dans la sphère hip-hop actuelle pour être souligné. Son créneau ? Un univers qui concilie imagerie rurale et références urbaines pointues, le tout porté par une technicité rap hors pair. SVR aka Saint-Vincent-de-Reins, petite bourgade française de 600 âmes nichée au cœur de la région Auvergne-Rhône-Alpes à laquelle l’artiste est profondément ancré. Si il s’évertue à mettre en avant son fief, Leo SVR tend à éviter de tomber dans le cliché, la frontière étant particulièrement friable avec des pastiches second degré et bien plus problématique, l’appropriation culturelle de l’extrême droite : « Tous les jours fuck Millésime K » déclare Léo sur « Serpent & Cie », luiqui prend souvent position dans ses textes. La line suivante évoque le blaze d’un artiste genevois bien connu : « Petit j’prenais ma baffe au concert de Slimka ».

Un souvenir inoubliable pour Leo, qui l’a conforté dans la poursuite de ses rêves : « En 2018 j’étais sur Paris pour mes études en graphisme. Le XTRM Tour de Slimka, Di-Meh et Makala faisait une halte dans la capitale donc j’y suis allé. Honnêtement, encore aujourd’hui c’est un des meilleurs shows auquel j’ai assisté ; l’énergie, le flow, la prestance scénique…des caractéristiques semblables à celles des groupes punk / rock alternatif que mes parents m’ont fait écouter quand j’étais plus jeune. Je tâtonnais déjà dans la musique et voir ça, ça m’a donné envie d’y croire. Je me suis dit « Si un jour je monte sur scène, je me promet de tout niquer comme eux ». Sept ans plus tard, ce dernier enchaîne les dates de concert et cumule quatre projets à son actif dont « SUNCHASER », 10 titres aux sonorités Détroit conçu suite à la perte d’un être cher : « J’ai commencé à plancher sur cette ligne directrice à partir de fin mars 2024. Ce qui est particulier avec ce disque, c’est que je l’ai confectionné dans ma bulle, en consultant mes proches avec parcimonie jusqu’au rendu final. Presque un an s’était écoulé depuis la parution de l’EP « Rap Instinctif Apologie » et ça m’a fait un bien fou de prendre le temps de faire les choses. En tant qu’artiste, on a ce pouvoir décisionnel d’agir sur notre cadence de sortie et je n’avais pas envie d’être ce gars qui se doit de sortir des projets tous les trois mois pour exister ».

Le Flow : Léo SVR

Ainsi, le skeud alterne entre tracks ego tripées (« À Ma Fenêtre, « Je Fais ! », « Après LeSummer ») et titres mélancoliques (« Temps Qui Sait », « Michel-Ange » avec Ben PLG).

Second invité de la galette, l’artiste parisien EDGE : « De base « SUNCHASER » ne devait comporter aucun featuring mais les morceaux coffrés avec lui et Ben ont raisonné comme des évidences. Il faut savoir qu’EDGE est un méga digger, c’est lui qui m’a écrit sur les réseaux carrément. Un jour il a commenté le titre « La Clause », on s’est connecté, il m’a proposé de faire une session stud’ et c’est comme ça que « Full Sang Froid » est né ». Il en résulte une alchimie artistique certaine entre les deux mc, le tout porté à l’écran par un clip qui fleure bon les références au cinéma de Guy Ritchie. Guère étonnant quand on sait que Léo accorde une grande importance à ses visuels : « Premier degré, si j’étais pas moi, « Full Sang Froid » ce serait mon clip préféré. Big up Jules Harbulot et Axel Chely ».

« J’ai poussé dans le bar du coin, je connais bien les manips et les combines » affirme le rappeur en préambule de son second couplet sur le bien nommé « Trap Bistrot », hommage au troquet tenu par sa grand-mère durant plus d’une décennie, « Chez Ginette » : « C’était un bar dit casse-croute uniquement ouvert le midi, à raison de 60 couverts par jour. Je trainais souvent dans la salle d’à côté avec mon petit frère pour me servir des sirops, regarder la télé et forcément, connaître les habitués. Il y’avait essentiellement des ouvriers qui s’arrêtaient là pour manger à la bonne franquette, le lieu était réputé pour son bon rapport / qualité prix. À la maison, on a d’ailleurs conservé l’enregistrement d’un reportage de France 3 à propos de l’ouverture de la pêche à Saint-Vincent de Reins ainsi que de la fameuse soupe au choux que ma grand-mère servait en lien avec les festivités. C’était obligé que je cale un extrait audio dans le morceau ».

En à peine trois ans, la trajectoire artistique du fer de lance de TM CORP a de quoi impressionner, même si ce dernier garde les pieds sur terre, conscient du chemin qui l’attend afin de se faire une place au soleil. À l’éventualité d’un featuring avec Slimka histoire de boucler la boucle amorcée en 2018, l’intéressé confie : « Ce ne serait pas une boucle mais un looping. Je trouve que Slimka possède une D.A de malade. C’est sûr que si l’on est amenés à bosser ensemble un jour, la vibe de ma punchline sur « Serpent & Cie » aura une dimension différente ». En attendant, il est fort probable que Leo SVR revienne en forme lors du mercato estival ; « J’ai quelques idées derrière la tête pour cet été… ».

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Crédit photos : Elie Vautey