Tisma, ride rapologique

Le Flow x Jeune Hustler

La connexion Argenteuil – Genève n’en finit plus de porter ses fruits. De passage en terres helvétiques le 17 mai dernier pour inaugurer la première partie de Jeune LC à la Gravière, Tisma s’est entretenu avec Le Flow sur la genèse de son parcours avec le flegme qui le caractérise. La vingtaine à peine, le Jeune Rookie ne se précipite pas, conscient du chemin parcouru sans pour autant occulter le fait que la ride est encore longue sur la voie du succès. Portrait.

Toute trajectoire aussi riche soit-elle possède son propre facteur déterminant. Dans le cas de Tisma, c’est une participation au Sale Versus du Chroniqueur Sale qui lui a permis de mettre le pied à l’étrier au sein de la sphère rap. Le concept ? Deux mc, des instrus éclectiques et surtout, une bonne dizaine de minutes de kickage. Lorsqu’il postule auprès du Chro’, le rookie n’a aucun son en ligne. Chose rare, il est tout de même sélectionné après avoir envoyé deux maquettes. S’en suit un Sale Versus troisième du nom d’ores et déjà mémorable : « Je me suis bien préparé en amont, je connaissais mes textes par cœur et sur le moment j’ai trop kiffé l’expérience. Avec du recul, je pense que l’avantage que j’ai eu par rapport à GRËJ c’est que j’avais pu écouter ce qu’il faisait mais lui non, étant donné que j’avais littéralement zéro tracks sur les plateformes ».

Le Flow x Jeune Hustler

Cette session est tombée à point nommé pour Tisma, qui vient tout juste d’arrêter son cursus en école nationale de danse. Il faut dire que ce dernier baigne depuis tout jeune dans le milieu artistique : « Ma mère exerce comme chanteuse et comédienne tandis que mon père était batteur, très à propos de la musique jazz. D’ailleurs il kiffait beaucoup le groupe Blackstreet ainsi que l’artiste d’Angelo, ce qui m’a permis d’explorer certaines sonorités hip-hop avant même de m’y intéresser concrètement. Grand fan de Michael Jackson, j’ai commencé à pratiquer le break à l’âge de 6 ans, avant d’enchainer avec la danse classique et contemporaine via le conservatoire de Paris pour ensuite filer en Belgique à l’école nationale ». Le rap, Tisma est tombé dedans progressivement, en scrutant de plus près les morceaux sur lesquels il dansait. J Dilla, Q-Tip et Battlecat ont amorcé cette découverte, rapidement rejoints par l’Entourage, Sexion d’Assaut ou encore la 75ème Session : « En fait quand j’ai pigé mon attraction pour le rap et la possibilité de m’y mettre sérieusement, j’ai commencé à faire mes devoirs si j’ose dire ».

Quelques mois après un Sale Versus couronné de succès, le Chroniqueur Sale fait part à Tisma de son envie de monter sa propre structure, avec une signature à la clé : « Direct j’ai été emballé par la proposition, d’autant plus qu’à notre première session stud’ on a écouté du son toute la nuit pour finir à 9h00 du mat’ sur cette conclusion ; Stevie Wonder est le plus grand artiste de tous les temps ». Avec Truckthomas la vibe a également été immédiate. Le premier truc qu’on s’est dit c’est « Putain toi aussi t’aime le jazz ? ». Aboutissement de plusieurs mois d’incubation sonore, la mixtape « Happy Dayz » libérée mi-septembre 2024. Avec son concept façon émission radiophonique, le disque composé de 14 pistes s’écoute d’une seule traite, et pas seulement en raison de la brève durée de chaque segment, l’alchimie entre les trois instigateurs du projet étant totale. Si le processus créatif peut paraître ultra pointilleux au premier abord, la réalité est légèrement différente dixit Tisma : « J’avais un max de textes accumulés en stock, des freestyles, des 16, 32, 64 mesures et des refrains…Un jour Le Chro’ est arrivé en mode, « viens on cale tout ça sur une mixtape ».Suite à la sortie de « Happy Dayz » les gens m’ont souvent confié qu’ils trouvaient le bail hyper construit alors que…mec c’est l’inverse en vrai (rires). Après, j’ai quand même conçu une bonne moitié des morceaux histoire de coller un minimum au fil rouge de la tape. On va dire que le produit final est un bon mix entre tout ça ».

Le Flow x Jeune Hustler

Le succès d’estime de ce premier véritable projet conduit Tisma à enchaîner les apparitions scéniques tout comme médiatiques, en atteste une session freestyle chez Skyrock en compagnie de BB Jacques, Dau et Kÿfy. En dehors de la scène parisienne, le rookie se plug avec la nouvelle vague du rap made in MTP ; OGLounis, LeDouble, Deelee S ainsi que le bien nommé Guydelafonsdal dont l’EP collaboratif « TISMADELAFONSDAL » est paru à l’aube du printemps. Contrairement à « Happy Dayz » et sa couleur résolument boom-bap, l’opus laisse place à des sonorités disparates : « En fait j’étais trop content d’arriver avec « Happy Dayz » car c’est le genre de rap que j’ai kiffé en premier étant petit. Mais en vérité j’aime poser sur plein d’instru différentes, et cet EP en est le parfait exemple. On a plié ça en 48 heures avec Guy, session efficace ».

Et la suite alors ? Toujours aussi radieuse selon le principal intéressé, dont le futur projet en commun avec Le Chroniqueur Sale est actuellement en phase de mixage. Désormais coutumier des allers-retours entre Paname et Genève, Tisma loue les talents de deux blazes précis bien connus de la scène hip-hop : « Mairo, je me suis pris son album « LA FIEV » comme jamais, donc pouvoir collaborer avec lui ce serait fou. Les gars de GrandBazaar aussi, on est bien connecté, à voir ce que la suite me réserve ».

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Crédit photo Elie Vautey
Journaliste : Francois Graz